Sirènes tueuses au Zimbabwe

Les sirènes nous sont familières mais elles sont également présentes dans d’autres cultures, notamment en Afrique. 

La sirène est surnommée, mawu-lisu au Benin, mamlambo en Afrique du Sud, mmnuommiri au Nigeria,  Kitapo en Zambie, mamba muntu au Congo, tous ces noms se rattachent à priori au terme Mother water/MamiWata,

Au Zimbabwe, ces créatures mi humaines, mi-poissons sont surnomées njuzu. Dans ce pays, dépourvu de tout accès à la mer, mais parcouru par quatre grands fleuves, dont le Zambèze et le Limpopo, les croyances envers les sirènes semblent faire partie du quotidien.

Les chutes Victoria, du fleuve Zambèze sont en partie au Zimbabwé

Fidèles à notre démarche, c’est dans la presse,  à travers la culture populaire, le folklore des simples gens, que nous allons débuter notre exploration de ce mythe bien vivant.

Un prophète zimbabwéen «sauve» une femme de sirènes: J’ai mangé du poisson cru pendant deux semaines

 Quand la réalité dépasse la fiction, une femme de 34 ans du village de Zenda,  dirigée par le chef Makumbe à Buhera,  affirme avoir été emportée par un tourbillon étrange dans une profonde caverne alors qu’elle se baignait dans la rivière Sebakwe , seul un soi-diant prophète connu sous le nom de Madzibaba Edborn a réussi à la délivrer.

Claris Chuma a raconté son épreuve aux quatre membres de sa famille :(..)

Ma sœur Melody et moi avons rendu visite à notre oncle et nous avons décidé de prendre un bain dans la rivière. Melody a vu un poisson et nous avons essayé de l’attraper. En essayant de le faire, un tourbillon inattendu m’a emportée et m’a emmenée dans une caverne profonde sous l’eau où j’ai trouvé trois dames, de belles femmes aux cheveux longs. Elles avaient un corps à moitié humain et à moitié poisson.

J’ai survécu pendant les deux semaines suivantes en mangeant du poisson cru car les dames ont menacé de me tuer si je refusais de les manger, alors je n’ai pas eu d’autre choix que de suivre leurs ordres

Le dimanche 06 octobre, Madzibaba Edborn, en compagnie de la famille et de membres de l’église s’étaient rendus sur les lieux de la disparition où une cérémonie avait été organisée.

Claris est alors apparue flottante au-dessus de l’eau et le prophète a demandé aux membres de la famille de cracher sur son corps pour qu’elle puisse reprendre conscience.

Les sirènes m’ont dit que je devais rentrer chez moi car certaines personnes me cherchaient. Elles m’ont tendu une flèche et un panier avec beaucoup de médicaments et ils m’ont ordonné de soigner les gens et de revenir avec des cadeaux en argent à la grotte pour les remercier. J’ai été choquée de voir ma famille et ces gens rassemblés autour de moi alors que je ne pouvais pas bouger. Le prophète a ensuite réduit en cendres le panier et je ne sais pas comment le remercier de m’avoir sauvé , a déclaré Claris.

Dans tout le Zimbabwé des sirènes sont régulièrement accusées de provoquer des noyades.

le titre est trompeur pas de happy end ici

Une sirène kidnappe deux garçons et les ramène vivants à Gokwe

(…) deux garçons sont morts dans des circonstances peu claires après avoir été capturés par une sirène présumée au barrage de Pachemumvuri. (…)

Confirmant l’incident choquant, le chef Nemangwe dont la juridiction relève de la région a indiqué qu’une cérémonie de purification avait eu lieu depuis au barrage pour calmer les esprits des eaux.

Il a été rapporté que le jour fatidique, les deux garçons qui étaient en 6ème et 5ème au collège Ganye gardaient des boeufs lorsqu’ils ont vu la sirène au barrage.

Selon un ami des garçons décédés, ses compagnons ont sauté dans le barrage et ont essayé de saisir la sirène parce qu’ils pensaient que ce n’était qu’un gros poisson.

« Mais à ce moment là, la sirène les a enfoncés dans l’eau », a déclaré le chef Nemangwe.

L’ami est ensuite rentré chez lui pour alerter les anciens, qui se sont rendus au barrage pour retrouver vivants les garçons allongés sur un rocher.

« Quand leurs parents sont arrivés au barrage, ils ont paniqué en croyant que leurs enfants étaient morts et ont commencé à pleurer.

« Un tourbillon a soudainement envahi l’endroit avant que la sirène ne soit rapidement sortie de l’eau et ait saisi les garçons pour la deuxième fois, mais cette fois leurs corps sans vie n’ont refait surface que plus tard »

Selon le chef, les noyades suspectes aux circonstances mystérieuses, se multiplient au barrage.

« j’ai connaissance de deux autres personnes qui ont également été tuées au même barrage dans des circonstances similaires. En tant que communauté, nous avons depuis effectué quelques rituels pour calmer les esprits des eaux. Lors de la cérémonie, nous avons abattu une bête et la viande a été consommée sans sel. « , a déclaré le chef Nemangwe.(…) .

Ce phénomène se retrouve dans la plupart des pays de la région, comme ici en Afrique du Sud.

La «sirène» de Mabopane secoue la communauté

 (…)L’idée d’une sirène diabolique vivant dans un barrage de Mabopane peut sembler étrange à certains, mais pas aux habitants de Mabopane, au nord de Pretoria.

Cette sirène, appelée mamogashwa à Setswana, aurait causé la mort de Mpho Shongwe, 15 ans, qui aurait été saisi et tiré dans l’eau par une créature ressemblant à une sirène au barrage de Marikana, au nord-ouest de Pretoria, a rapporté Rekord North.

La gendarme Petunia Chabangu, porte-parole de la police, a affirmé que les amis de Shongwe, âgés de 11 à 15 ans, ont déclaré avoir vu une femme près du barrage.

Ils ont dit que la femme les avait appelés à se rapprocher, leur a donné 1 rand à chacun ( environ 5 cents) et leur a dit de revenir le lendemain, ce qu’ils ont fait,

Lorsqu’ils étaient occupés à lui parler, l’un des enfants a vu que cette femme était en fait un poisson de la taille aux pieds, a déclaré Chabangu.

Il a alerté les autres enfants, mais alors qu’ils essayaient de s’enfuir, le mogogashwa a attrapé Shongwe et l’a tiré vers le barrage.

Les autres enfants ont alerté les anciens qui se sont précipités pour retrouver le jeune garçon gisant mort à quelques mètres du barrage. (…)

La famille de Shongwé elle,  rejette toute idée qu’il ait été tué par une sirène. (…)

Selon Elsie Nhlapo, une résidente, une femme présumée être une sirène aurait été vue à plusieurs reprises sur les rives du barrage.

« Nous avons parlé de la sirène à la police, mais ils ont peur d’aller enquêter là-bas« , a déclaré Elsie Nhlapo.

«Trois personnes que je connais, deux enfants et un adulte ont été tués au barrage mais la police a refusé de s’approcher du barrage», a-t-elle déclaré.

Fait intéressant il est précisé dans l’article que la famille du garçon retrouvé noyé ne croit pas à une cause surnaturelle. Pour eux quelque-chose d’autre s’est passé, qui met forcément en cause l’attitude de ses camarades. Un jeu s’est-il mal terminé ou n’ont-ils simplement pas eu les bons réflexes au bon moment ?  La sirène alors devient une explication bien commode pour ne pas affronter les reproches, les responsabilités, et les remords.

La croyance dans les sirènes peut elle-même avoir des conséquences fatales comme ici :

Une femme se noie dans le réservoir de Chikanga

   Une femme de Greenside s’est noyée la semaine dernière dans le réservoir d’eau de Chikanga Extension, où elle serait allée effectuer des rituels traditionnels avec des amis.

Le corps de Bridget Mangazi a été découvert flottant dans le barrage par Joseph Mutimudye, un résident de Chikanga, qui a alerté la police.

L’inspecteur Tavhiringwa Kakohwa, porte-parole de la police de Manicaland, a confirmé l’incident.

Il a ajouté que Mangazi (28 ans) s’était rendue au barrage avec cinq amis pour des rituels traditionnels, mais alors qu’elle voulait se soulager elle est tombée dans l’eau.

Au lieu de l’aider, ses amis l’ont laissée et se sont précipités dans le village de Himalaya, sous la direction du chef Zimunya, à la recherche de ses parents, car ils pensaient qu’elle avait été emportée par une sirène, a déclaré l’inspecteur Kakohwa.

Le corps de Mangazi a été découvert par une passante avant le retour de ses amis.

Les principaux cours d’eau du Zimbabwé

Le taux de décès par noyade au Zimbabwé est plutôt faible comparé à celui de ses voisins mais des efforts sont entrepris pour améliorer l’apprentissage de la natation,  notamment pilotés par la nageuse zimbabwéenne la plus titrée Kristy Coventry.

La cause pourrait être entendue, des cas de noyades accidentelles comme il en survient partout, tout le temps, et on accuse les sirènes pour mettre des mots sur son chagrin, pour trouver une explication au malheur, une logique à l’injustice ?

Peut-être n’est-ce pas aussi simple.

Revenons sur un autre trait commun à ces récits sur les sirènes, ils se déroulent le plus souvent aux abords du lac-réservoir d’un barrage. Le mythe des sirènes n’a pas disparu lorsque les pays africains ont commencé à construire des infrastructures, bouleversant les réseaux hydriques pour irriguer et apporter l’eau potable à la population.

Au contraire, il semble que la vigueur actuelle des croyances envers les sirènes soit étroitement liée à la construction de ces énormes édifices qui ont bouleversé les éco-systèmes.

Au tournant des années 2010, le Zimbabwé de Mugabé lance un programme pour améliorer l’irrigation et l’accès à l’eau potable, qui aujourd’hui encore, pour diverses raisons sont problématiques.

Mais alors que des promesses avaient été adressées à la population, la mise en fonctionnement des principaux barrages et retenues d’eau est sans cesse retardée. Bientôt le gouvernement lui-même doit reconnaître que la situation est anormale.

Le vaste programme est au point mort, à qui la faute ?

Les sirènes bloquent les travaux à Gokwe

GOKWE – Le conseil municipal de Gokwe a suspendu les travaux d’un projet d’approvisionnement en eau destiné à remédier aux pénuries d’eau persistantes après que des «sirènes» présumées aient été repérées au barrage de Gwehava.

Tapiwa Marongwe, secrétaire municipal de Gokwe, a déclaré que les travaux sur le pipeline devaient être suspendus afin qu’une cérémonie traditionnelle soit organisée pour apaiser les esprits soupçonnés d’être derrière ces créatures.(…)

Pour le moment, tout est prêt pour que l’eau soit pompée de Gwehava et améliore l’approvisionnement en eau de la ville, a-t-il déclaré.

Cependant, il y a des défis impliquant le surnaturel qui doivent être traités en priorité.

Des rapports non confirmés d’enfants disparaissant au barrage ont été rapportés.

Les villageois ont blâmé les créatures mystérieuses pour ces disparitions, tandis que les ouvriers du bâtiment affirment avoir découvert que leur équipement avait été déplacé tous les matins. (…).

Barrage d’Osborne

Science versus surnaturel

 Par Tendai Chara

Avez-vous déjà entendu parler d’étranges serpents et de créatures mystérieuses qui empêchent le fonctionnement des pompes à eau dans les barrages et les puits?

Ou de sirènes qui sont supposées causer des pannes électriques? Aussi fictif que cela puisse paraître, des histoires sur les conflits entre la science et le surnaturel ont été racontées depuis des temps immémoriaux.(…)

Au Zimbabwe, il y a trois cas fascinants dans lesquels le surnaturel se serait heurté à des travaux scientifiques. Dans cette «bataille des esprits», il semble que le surnaturel ait toujours triomphé de la science. (…)

Récemment, des choses étranges auraient été observées au barrage de Gwehava, une source importante d’eau pour le centre de Gokwe. Il est largement admis qu’une fois, une sirène et un énorme serpent ont causé le dysfonctionnement des pompes du barrage.

Il est dit qu’après que les ingénieurs aient installé les tuyaux et les pompes, le système ne fonctionnait tout simplement pas malgré tous leurs efforts, laissant aux ingénieurs de nombreuses questions sans réponse. Comme si les observations de sirènes ne suffisaient pas, les ingénieurs ont été choqués de découvrir un énorme serpent enroulé à l’intérieur de l’une des canalisations, bloquant ainsi l’écoulement de l’eau. Comment l’énorme serpent est entré dans le tuyau étroit cela reste un mystère.(…)

Les sirènes du Zimbabwe apaisées par le rituel traditionnel de la bière

Au Zimbabwe, un barrage envahi par les sirènes est opérationnel,  après que des guérisseurs traditionnels aient brassé de la bière pour apaiser les esprits malins de l’eau.

Les « sirènes » avaient harcelé des travailleurs qui installaient des pompes à eau dans un barrage situé près de la petite ville de Gokwe, dans le nord du Zimbabwe, selon les médias locaux.

Le ministre des Ressources en Eau, Samuel Sipepa Nkomo, a déclaré devant un comité du Sénat la semaine dernière que les travaux des pompes du barrage de Gokwe s’étaient arrêtés après que des travailleurs terrifiés se soient plaints de la panne de machines dans des circonstances mystérieuses, et accusaient des sirènes, a rapporté le journal gouvernemental Herald.

Nkomo a déclaré que le même problème avait été signalé au barrage d’Osborne, près de Mutare, dans l’est du pays. Il a appelé à la tenue de rituels traditionnels dans les barrages, y compris la bière brassée de manière traditionnelle, afin de les débarrasser de la menace des sirènes.

Au barrage d’Osborne, des plongeurs avaient été envoyés pour enquêter sur les causes des obstructions des pompes, mais sont revenus à la surface de l’eau, jurant de ne jamais redescendre, a rapporté la South African Press Association.

Nous avons même embauché des Blancs pensant que nos garçons ne voulaient pas travailler mais ils sont également revenus en disant qu’ils ne retournerait pas dans cet endroit , a déclaré Nkomo au comité sénatorial.

Le problème de Gokwe aurait été résolu à la fin de la semaine dernière lorsque le ministère de l’eau a engagé des guérisseurs traditionnels pour mener des rituels. Les chefs traditionnels ont organisé une cérémonie au cours de laquelle ils ont abattu du bétail et brassé de la bière pour apaiser les esprits de l’eau.

Je ne crois pas aux sirènes, mais je crois ce que dit la communauté qui vit dans la région a déclaré Nkomo, selon SAPA.

Sipepa Nkomo a depuis quitté la politique

La construction d’un barrage perturbée par des événements surnaturels ? Ce n’était pas la première fois au Zimbabwé que la population avait cette perception. Dans les années 1950, la construction d’un barrage s’est déroulée dans des conditions apocalyptiques. Ce chantier a vu se multiplier les incidents aussi étranges que tragiques, dont le souvenir ne s’est pas effacé. ,

Mais cette fois les sirènes n’y étaient pour rien.

Barrage de Kariba

Le lac Kariba, long de 250km, large de 30km,  est artificiel et a été créé lors de la construction d’un barrage sur le fleuve Zambèze dans les années 1950 pour fournir de l’énergie hydroélectrique au Zimbabwe. Aujourd’hui, il représente environ 50% de l’électricité du Zimbabwe.

Avant la construction du mur du barrage, la vallée du Zambèze était occupée par le peuple Tonga – une tribu de chasseurs cueilleurs qui menait une vie simple et qui croyait en des dieux et des créatures mythiques. En 1955, les travaux de construction du barrage ont commencé et la vie simple qu’ils connaissaient jadis a volé en éclats. Les arbres ont été abattus, des routes construites et des communautés détruites.

La veille de Noël, cette année-là, une inondation sans précédent s’abattit sur la gorge, emportant les fondations du barrage. En novembre 1956, de fortes pluies sont tombées un mois avant leur arrivée normale, ce qui a provoqué de nouvelles inondations et entravé les travaux du barrage. Le peuple Tonga croyait que ces événements étaient l’œuvre de Nyaminyami, le dieu du fleuve Zambèze.

Peu à peu, beaucoup pensaient que la colère de Nyaminyami s’est apaisée, le mur du barrage ayant été achevé en juin 1959 et l’immense lac de 3900 km2 commençant à se remplir. Mais la catastrophe continua. Le lac se remplissait beaucoup plus rapidement que prévu et les animaux se sont échoués sur des collines surélevées (aujourd’hui des îles) au milieu du lac. Beaucoup ont commencé à mourir de faim, jusqu’à ce que l’opération Noah soit mise en place pour sauver quelque 6 000 animaux qui étaient en perdition.

 Certains ont été sauvés, mais beaucoup ont péri et, en conséquence, l’une des plus grandes îles du lac Kariba est connue sous le nom d’île de la famine.

23 éléphants, 44 rhinos, 43 lièvres, 300 antilopes, 172 singes, six écureuils, 46 zèbres ont été secourus

Pour clore momentanément ce dossier, il est temps de mettre en avant deux peintures rupestres authentiques qui représentent quelque-chose ressemblant à une sirène. Elles viennent toutes deux d’une même région : l’Afrique australe.

A l’est du Cap, en Afrique du sud, le site de Leuublad présente une grotte se trouvant sur un terrain privé.

Ces peintures rupestres ont été décrites dans l’ouvrage  «Water, Stone & Legend – L’art rupestre du Klein Karoo», de Renée Rust.

Attention, nous ne connaissons pas la signification qu’avaient ces dessins pour leurs auteurs, il n’est pas vraiment judicieux de les considérer de prime abord comme des représentations de sirènes, mais tout de même la ressemblance est intéressante.

Parmi ces représentations celle ci est surnommée la sirène

Cette région semi-aride du Karoo, située au nord et à l’est de la ville du Cap, était il y a 250 millions d’années complètement immergée. Puis l’eau s’est retirée pour laisser place à des vallée fertiles et d’innombrables grottes. Certaines sont des splendeurs géologiques comme les Cango caves, d’autres contiennent des peintures rupestres œuvres du peuple Khoi San qui vivait dans cette région.

Parmi les peintures des San figurent ces êtres ressemblant à des sirènes. Certains y voient des hirondelles, un symbole associé à la pluie dans les rites shamaniques.

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