Créatures mythiques du Québec

Gravure de Thomas Johnston ( 1708-1767)

Nous allons tenter de passer en revue certaines créatures mythiques du Québec, qui est la plus grande des dix provinces canadiennes, et la deuxième plus peuplée du pays. Une partie du folklore fantastique est issue des croyances des populations européennes, notamment françaises qui ont colonisé le Canada à partir du 16ème siècle.

Mais la première créature mythique que nous allons aborder est autochtone :

WINDIGO

Windigo est un être surnaturel qui appartient à la tradition spirituelle des peuples premiers de langue algonquienne en Amérique du Nord. Les Algonquins sont un peuple autochtone de la nation des Kitchesipirinis, ils vivent au Québec et en Ontario. Un windigo est un monstre cannibale qui s’en prend aux personnes vulnérables et socialement isolées. L’une de ses particularité est la capacité d’imiter les voix humaines pour attirer les gens et les éloigner de la civilisation.

Windigo (1963) l’artiste anishinabé Norval Morrisseau, décédé en 2007, est considéré comme le pionnier de l’art autochtone au Canada.

Une traduction approximative de windigo est « l’esprit maléfique qui dévore l’humanité ». Cela renvoie à un autre de leur pouvoir : la possession. Une fois que le windigo a infiltré les esprits humains, il peut instiller le même désir pour la chair humaine, transformant également les humains en windigo. Dans la plupart des versions de la légende, l’homme devient un windigo après que son esprit soit corrompu par la cupidité ou affaibli par des conditions extrêmes comme la faim et le froid. Dans d’autres versions, l’homme se transforme en windigo lorsqu’il est possédé par un esprit vagabond dans un moment de faiblesse..

La légende du windigo fait partie de l’histoire orale algonquienne depuis de nombreux siècles, longtemps avant l’arrivée des Européens en Amérique du Nord.

Le parc national de Mauricie, la région de Trois-Rivières est l’ épicentre du phénomène windigo au Québec.

Le premier Européen à raconter par écrit une rencontre avec un windigo est Paul Le Jeune, un missionnaire jésuite qui vécu parmi le peuple algonquin au début du 17e siècle sur le territoire actuel du Québec. Dans un rapport qu’il envoie à ses supérieurs à Paris en 1636, Le Jeune écrit :

Cette femme diabolique… a ajouté que [le windigo] avait mangé des Attikamegoukin – les tribus qui vivent au nord de la rivière appelée Trois Rivières – et qu’il en mangerait d’autres s’il n’était pas appelé ailleurs. Atchen (une créature apparentée au loup-garou) viendrait à sa place pour les dévorer… jusqu’à la forteresse française. Il massacrerait les Français.

Basil H. Johnston (1929-2015), auteur, linguiste et professeur anishinabé (ojibwé)

Basil H. Johnston est des auteurs autochtones les plus importants du Canada et conférencier du Musée royal de l’Ontario, il a beaucoup écrit au sujet des traditions, de la langue et de la vie moderne des Anishinabés :

« Le Windigo était émacié à un point extrême, sa peau desséchée tirée et tendue sur ses os. Avec ses os poussant contre sa peau, elle-même de la couleur des cendres grises de la mort, et ses yeux repoussés au plus profond de leurs orbites, le Windigo ressemblait à un squelette récemment déterré de sa tombe. Ses lèvres, étaient en lambeaux […] souillé de sang et de souffrance et de suppurations de la chair, le Windigo dégageait une odeur étrange et inquiétante de dégradation et de décomposition, de mort et de corruption. »

Basil Johnston explique que Windigo « a vu le jour en hiver et arrêté les villageois et assailli les vagabonds. Toujours affamés, ils avaient soif de chair humaine, qui est la seule substance qui pourrait les nourrir. L’ironie est qu’ayant mangé de la chair humaine, les Windigos ont grandi en taille, de sorte que leur faim et leur envie sont restées proportionnelles à leur taille; ainsi ils étaient éternellement affamé » .

Selon l’ethnohistorien Nathan Carlson, il a également été dit que le windigo a de grandes griffes acérées et des yeux massifs comme un hibou. Cependant, certaines autres personnes décrivent simplement le windigo comme une silhouette ressemblant à un squelette avec une peau cendrée.

Le windigo est associé aux péchés de gourmandise, de cupidité ou d’excès en tout genre, le mythe devenant ainsi une façon de prôner la coopération et la modération.. Il n’est jamais satisfait après avoir tué une personne pour la dévorer, et se met constamment à la recherche de nouvelles victimes.

Au début du 20e siècle, le terme « windigo » vient s’incorporer au vocabulaire médical occidental. La première génération de psychiatres l’utilise pour faire référence à un état mental dans lequel les patients se croient pris de désirs cannibales. Le missionnaire oblat J. E. Saindon est le premier à utiliser le terme dans les années 1920 dans le cadre de son travail dans une communauté crie de l’ouest de la baie James. Là-bas, une femme lui raconte avoir vu des étrangers qui voulaient la tuer et dévorer son corps. J. E. Saindon décrit alors l’état mental de la femme comme une « psychonévrose », soit un trouble mental ou comportemental caractérisé par la dépression et l’anxiété. Cet état mental sera connu ultérieurement sous le nom de « psychose du windigo ». À ce jour, toutefois, la communauté médicale demeure sceptique quant au caractère réel de cette maladie.

La majorité des observations supposées de windigo se sont produites entre les années 1800 et 1920. L’un des cas les plus rapportés d’un esprit windigo possédant un humain est celui de Swift Runner, un Amérindien qui a assassiné et mangé toute sa famille à l’hiver 1879. Il a prétendu être possédé par un windigo au moment des meurtres et a été pendu pour son crime.

Swift Runner et des restes de certaines de ses victimes

Windigo en est également venu à servir de métaphore pour les injustices faites aux populations autochtones au Canada, notamment les pensionnats indiens, la restriction des droits dans la Loi sur les Indiens, la rafle des années 1960 et certaines autres politiques d’assimilation. Pour certains Autochtones, le windigo symbolise la destruction amenée par la colonisation.

Dans ce film canadien réalisé par Robert Morin, sorti en 1994, n groupe d’Indiens s’empare d’un territoire du Grand-Nord québécois et décrète l’indépendance. Un journaliste décide de remonter la rivière Windigo pour les rencontrer.

LES MONSTRES LACUSTRES

Norval Morrisseau, Esprit aquatique (Water Spirit), 1972
Acrylique sur papier kraft, 81 x 183 cm
Musée canadien de l’histoire, Gatineau, Québec

Avec ses nombreux fjords, lacs, et rivières, le Canada n’échappe pas aux histoires de créatures lacustres fantastiques.

Le monstre du Memphrémagog

Ce lac de 42 km de long, se trouve dans la partie sud du Québec, il marque la frontière entre le Canada et la région d’Estrie, avec les Etats-Unis et le Vermont. Memphré est la créature aquatique mystérieuse la plus célèbre de la province.

L’ animal est souvent décrit comme ressemblant à un serpent de mer ou à un plésiosaure comparable au Cadborosaurus ou à Nessie.

La bête est si connue qu’elle fait partie du Patrimoine National des Québécois et est devenue l’emblème de la Ville de Magog.

Le neveu de Ralph Merry III, colon venu du Vermont et fondateur de Magog, a écrit en 1816 dans son journal conservé à la Société Historique de Stanstead, qu’il a rencontré 8 personnes qui lui ont raconté 4 apparitions du serpent de mer au lac Memphrémagog. Il ajoute : »J’ai ouï dire que les Indiens ne se baignaient pas dans le lac à cause des serpents géants et des alligators.

         Un traité de Géographie publié en 1871 mentionne « Il n’y a pas de serpents à sonnettes, mais il ne faut pas oublier le gros serpent qu’on nomme Anaconda  et qui se montre gratis au lac Memphrémagog. »

The Sea Serpent Legend, écrit par Norman Bingham au début du XlXe, reprend une vieille légende indienne. On y révèle le rôle prépondérant joué par le serpent dans la tragédie amoureuse d’un couple indien, en y offrant, de surcroît, une description sommaire de l’animal, et l ‘endroit où se nicherait sa tanière aquatique, le bien nommé lieu-dit : Owl’s head:

They saw a monster dark and grim

Coming with coiling surge and swim,

With lifted head ans tusk and horn,

Fierce as the spirit in Hades born.

The Serpent e’re now in the depths did roam

Under Owl’s Head to his cavernous home.

After digesting this horrible meal

His snakeful majesty did out again reel,

(….)

De couleur foncée, l’air menaçant, le monstre nage d’un puissant mouvement spiral vers les malheureux, sa tête levée munie d’une corne et d’une défense, aussi menaçant que les esprits maléfiques de l’enfer. Le Serpent est maintenant dans les profondeurs où il a erré sous Owl’s Head à sa maison caverneuse. Après avoir digéré cet horrible repas sa majesté serpentine refit tournoyer, (…)

L’héritage de Jacques Boisvert.

Décédé en 2006 à l’âge de 74 ans, le Magogois Jacques Boisvert est considéré comme le «père spirituel de Memphré» .  Plongeur émérite, passionné d’histoire, il a retrouvé de nombreux témoignages sur la créature. En 1983, après plusieurs milliers de plongées dans le lac Memphrémagog, il décide d’écrire un article pour le Newport Daily express. Puis en 1986, Il crée la Société de dracontologie, qui archive découvertes et témoignages depuis 1816 jusqu’à aujourd’hui, afin de favoriser les recherches.

Le mot dracontologie, désigne la science des créatures étranges «lacustres aquatiques», pouvant habiter les lacs québecois. Ce néologisme a été accepté et officialisé par l’office de la langue française du Québec le 3 décembre 1984. Le terme anglais « dracontology » a été accepté un an plus tard par «American Heritage Dictionary».

A la fin de 2001, la société de draconologie avait compilé  223 apparitions impliquant  au moins 465 personnes. On estime ainsi à huit le nombre moyen d’apparitions annuelles authentifiées, et ce, par une vingtaine de témoins.

Quelques exemples :

Le Stanstead Journal, du 20 août 1868 rapporte qu’un groupe de faucheurs a vu de la berge près de l’île Lord’s, une créature dont la tête sortait quelques pieds hors de l’eau,  le corps était  de la grosseur d’un billot et couvert d’écailles brillantes.

En 1961, deux pêcheurs faisant route vers Newport ont pu observer pendant environ une quarantaine de secondes une créature noire de plus de 20 pieds (6 mètres) qui nageait, entrant dans l’eau et en ressortant. Selon un de ces hommes, cette créature, qui se trouvait à moins de 200 pieds (60 mètres) de leur embarcation, avait un dos rond et une tête indescriptible. Cette vision était accompagnée d’un bruit « étrange ».

En juillet 1996, quatre personnes ont témoigné de sa présence après l’avoir contemplée pendant plus d’une minute. Selon leurs dires, c’était une créature à bosses multiples de plus de 20 pieds (6 mètres) qui nageait à quelques 50 verges/yards (45 mètres), entre leur bateau et la berge. Cette apparition, survenue vers 19 h, est similaire à celle vécue le même jour vers 16 h, à 10 milles de là (16 km), par trois autres personnes.

1998-octobre Gerry Campbell. Vers midi dix il déjeunait sur le quai de Georgeville. Il y avait de grosses vagues ce jour-là. Tout à coup en regardant au large vers sa droite (nord) à 400 pieds du quai ( 120 mètres), il a vu apparaître une créature étrange qui affrontait la vague, la couleur était bleu noir avec des creux. C’était la deuxième fois qu’il voyait un monstre. La créature s’est tournée brusquement vers le quai puis a disparu, la séquence a duré environ 5 minutes.

1999 juin – Minya Gavrilovic  fait une bonne description par Internet d’une créature ressemblant à un alligator dans le secteur de la pointe Magoon.

1999 – juillet – – Terry Carpenter de Derby Line a vu un phénomène étrange à Eagle Point.

1999 juillet –  David Pritchie de Newport, a vu un phénomène Eagle Point. La bête avait une tête qui sortait de 4 à 5 pieds (1m30)  de la surface de l’eau..

1999 juillet,   Marc Grenier accompagné de son épouse,  a vu dans le baie de Magog un phénomène étrange  qui se déplaçait vers La  Brise, couleur gris noir foncé avec 2 à 3 bosses, la bête  entrait et sortait de l’eau.

2000 5 mai – Il y a 30 ans qu’Adrien et Claire Rompré vivent sur la rive est du lac Memphrémagog. Des embarcations de toutes les tailles, ils en ont donc vu des milliers passer devant chez eux. Aussi, quand Adrien Rompré a vu de la fenêtre de son salon un sillage se former entre son quai et une bouée rouge placée à unecœntaine de mètres de la rive, il a tout d’abord cru que c’était le sillage d’une embarcation, peut-être celui de l’embarcation de son voisin. Il y avait cependant quelque chose qui jurait: il n’y avait pas d’embarcation là où le sillage se formait.

Adrien Rompré devant le lieu de l ‘observation.

«Il y avait quelque chose d’assez long, d’assez gros aussi parce que la vague avait un bon pied de haut. Je ne pouvais pas dire quoi. Je suis sorti sur le balcon avec ma longue-vue. Ce que j’ai vu mesurait de cinq à six pieds de long ( 1m50/2m). Ça avait une tête brun foncé de la grosseur d’une tête d’adulte et des grands yeux. J’ai crié à Claire qui travaillait sur son ordinateur de venir voir, qu’il se passait quelque chose d’inhabituel». Adrien et Claire Rompré ont observé la créature pendant 5 petites minutes, jusqu’à ce qu’elle arrive près d’une petite île située à quelque chose comme 2000 pieds ( 600 mètres) de chez eux. Là, elle a disparu sous l’eau et elle n’est pas reparue. Avant qu’elle ne disparaisse, ils l’ont vue sortir la tête au-dessus de l’eau au moins trois fois.

«Ce n’était pas difficile à suivre: ça avançait assez lentement et le lac était calme; de plus, il fait encore très clair à 19 h à ce temps-ci de 1’année. C’était un animal, ça, c’est sûr. Est-ce que c’était un poisson ? Certainement pas. Je ne pense pas non plus que c’était un reptile. Je dirais que ça ressemblait plutôt à une loutre géante, comme les loutres de mer que j’ai vues dans un documentaire présenté sur Discovery channel»

Un témoin, et le croquis de son observation en 2003

2000  juin -Vers 14:00 Joanne, Serge et Bruno Nadeau, de Sherbrooke, leur bateau était ancré au fond de la baie Sargent, le lac était calme lorsque tout à coup, ils virent ce qui leur semblait une immense vague. Ils ont observé pendant quelques minutes une créature d’environ 75 pieds de long (23 mètres) avec une immense tête et une queue. Lorsque la tête entrait dans l’eau, la queue sortait,  ce phénomène s’est produit 8 à 10 fois, la créature était brune et lisse, et allait vite. Elle s’est déplacée sur une distance d’environ 2000 pieds ( 600 mètres). Tout près il y avait un couple et lorsqu’on leur a crié de regarder, la créature a plongé pour ne pas revenir. La tête de la bête ressemblait à une tête de cheval ».

En 2016,  Carl Poulin et sa mère Joan Thouin effectuaient une sortie de pêche à bord de leur embarcation lorsqu’ils ont été témoins d’un mouvement inhabituel à la surface de l’eau, vers 10 h 30. Cette journée-là, le lac était comme une mer d’huile, selon les deux résidants de Magog. «On se trouvait à environ 300 mètres du quai (900 pieds), où il y a une quinzaine de pieds de profondeur (4m50), quand on a aperçu un étrange sillon. On a clairement vu une surface noire et luisante à une centaine de mètres du bateau. La texture ressemblait au dos d’une sangsue. Nous n’avons pas vu la tête, ni la queue, mais ça devait avoir une longueur de 23 ou 24 pieds ( environ 7m). Ça a peut-être duré une quarantaine de secondes, mais on était en état de choc. Ma mère me criait de virer de bord au plus vite, alors que moi, j’attendais de voir ce qui allait se passer. Malheureusement, l’appareil photo est demeuré dans le fond du bateau », ajoute Carl Poulin,

 « Ça fait 60 ans que je navigue sur le lac et c’est la première fois que je vois une telle chose. Jacques Boisvert avait raison ; il y a bien une créature qui vit dans le lac Memphrémagog », estime Mme Thouin.

Les témoignages décrivent surtout 3 types de créatures : le serpent de mer avec bosses, le cheval marin et finalement le type alligator. Les apparitions les plus souvent observées sont définitivement le serpent de mer avec bosses. Il est à noter qu’à cause de sa taille gigantesque, entre 20 et 70 pieds (6 à 20 mètres) selon différents témoignages, la créature n’a jamais pu être observée dans son intégralité. Certains ont pu voir la tête de Memphré, d’autres son ventre, et d’autres enfin la « queue » du serpent.

Bernard Heuvelmans, s’est prononcé sur l’identité probable de notre ami Memphré:

Je persiste à croire que Memphré fait partie de la famille des long-cous. C’est la seule explication qui colle, suite à toutes les observations d’animaux ondulants dans le plan vertical. Ceux qui, en fait, forment la majorité.

La théorie la plus répandue est celle des plésiosaures . Cependant, l’absence chez cette espèce d’un système respiratoire permettant de vivre complètement submergé sur une longue période ne plaide pas en faveur de cette éventualité.

Pour certains, l’opacité des eaux des lacs de la région pourrait favoriser la survie de poissons inconnus, et ce, à des profondeurs inexplorables. Des phénomènes étranges sont signalés dans les lacs voisins du Memphrémagog, en l’occurrence les lacs Massawippi, Bowker et aussi celui de Brompton. Certains plongeurs confirment que dans les eaux du lac Brompton, par exemple, la visibilité est pratiquement nulle à 10 mètres de profondeur. Certains parlent aussi d’anciens passages souterrains qui reliaient entre eux certains lacs de la région, comme les lacs Brompton-Bowker-Larouche et les lacs Memphrémagog-Massawippi.

Le lac Memphrémagog a été jumelé à l’été 1996 avec le lac Ikeda au Japon. Les deux lacs sont habités par des monstres marins.

Autres lac hantés du Québec

Pohénégamook

Pohénégamook est un village de la région du Bas-Saint-Laurent, situé au sud de Rivière-du-Loup, un peu à l’intérieur des terres, au bord d’un lac immense. D’une superficie d’environ dix-sept kilomètres carrés ( 4200 acres), ce grand lac, d’ une centaine de mètres de profondeur abriterait, une créature à la tête de vache et au corps de serpent, surnommée aujourd’hui Ponik. Selon les légendes du peuple amérindien Malacite du lac Pohénégamook, un grand animal aquatique y vit depuis des siècles dans les fosses abyssales de cette mystérieuse étendue d’eau.

Des évènements étranges – comme un quai déplacé, une tempête inexpliquée, un débordement du lac hors de son lit alors qu’il n’y avait pas de vent – trouvent leur explication dans la présence mystérieuse d’un monstre habitant les profondeurs du lac Pohénégamook. En octobre 1957, Wadim Vladikov, biologiste de renom, aurait déclaré que le monstre était en réalité un gigantesque esturgeon, de même taille que ceux vivant en haute mer. Sachant que ces poissons peuvent facilement atteindre près de huit mètres de longueur et peser dans les quatre cents kilos, il émit l’hypothèse suivante : un pêcheur autochtone aurait relâché dans le lac un esturgeon qu’il aurait pris en mer et qui se serait plutôt bien adapté à son nouveau milieu. S’accouplant avec des femelles d’eau douce, le monstre des mers aurait ainsi engendré une espèce hybride qui peuplerait désormais le lac Pourtant, la plupart des témoignages évoquent une forme serpentiforme munie de bosses.

Le lac Saint-Jean

Saint-Jean

Surnommé la mer d’eau douce, c’est le troisième plus grand lac naturel du Québec, d’une longueur de 44 kilomètres. Le monstre qui ondule dans le lac Saint-Jean porte le nom d’Ashuaps. Les Amérindiens plaçaient le repaire du monstre sur l’île aux Couleuvres, qui était autrefois en quelque sorte un sanctuaire pour eux. Dans les années 1970, les journaux du lac ont rapporté d’insistantes observations d’un monstre qui y aurait été aperçu par un grand nombre de témoins. Le Journal de Québec, L’Étoile du lac, Le Progrès du Saguenay, le Lac Saint-Jean et plusieurs autres publications lui ont dédié des pages entières, avec de gros titres, photos de témoins et entretiens.

On peut citer bien d’autres lacs hantés du Québec :  lac Aylmer, lac Mekinak, lac Williams, lac Brompton, lac Décarie….

BIGFOOT

Il y a de nombreuses observations de créatures de type bigfoot au Québec. D’ailleurs il exista même un festival du sasquatch à Saguenay jusqu’en 2018.

Le 30 septembre 2012, en fin d’après-midi d’un samedi pluvieux et venteux, Maggie Cruikshank et sa cousine quittent le village d’Akulivik pour cueillir des baies. Elles vivent au Nunavik, un territoire immense de 500 00 km² peuplé à 90% d’Inuits. Leurs quads foncent dans un paysage de toundra parsemé de forêts boréales, quand finalement elles trouvent ce qu’elles cherchaient : des baies de grande taille.

Sans perdre de temps elle débutent la cueillette, soudain, « ma cousine a remarqué quelque chose » raconte Mme Cruikshank dans cet article, « au début, elle pensait que c’était un chasseur, mais je l’ai ignorée parce que je voulais rentrer chez moi avant le coucher du soleil. Puis, elle m’a dit qu’elle avait peur. Alors Je me suis relevée et j’ai regardé vers l’endroit qu’ elle me montrait. C’était un très gros animal, un bigfoot. La créature était noire, poilue et sans aucun vêtement. Plus grand et plus large qu’un homme, il marche comme nous mais ne se tient pas droit comme nous, il peut sauter et ramper. Et son empreinte mesure environ 40 centimètres. »

Ces photos ont été prises par le témoin. Par chance elle a pu immédiatement mesurer les empreintes laissées par la créature. Sur le second cliché les orteils sont visibles.

Le témoins s’est aperçu que d’autres personnes à Akulivik ont ​​également vu la créature. Un groupe de chasseurs de morses qui venait de rentrer avec leurs prises. Ils s’apprêtaient à cacher leur viande sous des rochers pour l’hiver lorsqu’ils ont vu le bigfoot. Quelqu’un d’autre l’a remarqué près de l’aéroport. D’autres personnes ont signalé d’étranges collections d’os de caribou entassés dans les collines à l’extérieur de la ville. Un ancien a trouvé ce qu’il a dit être des ossements humains dans une grotte à l’extérieur de la ville et lui a suggéré que les restes pourraient être l’œuvre du bigfoot. Et la semaine dernière, apparemment, quelqu’un a repéré de nouvelles pistes de bigfoot. Quelqu’un d’autre aurait vu la créature debout au sommet d’une montagne.

« Il y a des gens qui me disent qu’ils se souviennent soudainement qu’ils ont déjà vu cette chose », a déclaré le témoin. « Comme il y a 10 ans ou 20 ans ou 60 ans, ils l’ont vu, ils ne l’ont tout simplement jamais signalé. » Mère, grand-mère, enseignante, le témoin est une personne éduquée avec un profond sens de la responsabilité qui l’a conduite à témoigner de ce qu’elle a vu. C’est une chance car les témoignages issus de la communauté autochtone sont bien trop rares.

Au cours des dernières années, a déclaré Maggie Cruikshank, les résidents ont aperçu de petits Inuits, connus sous le nom d’Inugagulligaq, ainsi que des animaux géants, dont un énorme serpent anaconda, une très grosse morue et des lapins monstrueux. D’autres personnes auraient vu une créature mi-homme mi-poisson, comme une sirène.

Nous avions déjà abordé le sujet du bigfoot au Québec dans l’interview ( ici en anglais) que nous avait accordé Yvon Leclerc, spécialiste reconnu des empreintes fossiles, scientifique indépendant qui a été amené à se pencher sur l’affaire dite du Mont Valins. En 2001, dans la région de Saguenay, un technicien forestier de Saint-Fulgence avait rencontré une suite impressionnante d’empreintes de pieds de très grandes tailles, et dans un réflexe aussi rare que précieux avait immédiatement contacté Yvon Leclerc qui a pu réaliser très rapidement des moulages de qualité. Le scientifique a ensuite appliqué son savoir-faire dans la recherche d’empreintes fossiles,  et grâce à une série de frottis sur les moulages, a pu montrer des détails anatomiques invisibles à l’œil nu. Non seulement ces empreintes étaient réelles, et ne provenaient pas d’un supercherie, d’un pied sculpté dans le bois par exemple. Mais en plus elles recelaient des informations inédites : ces empreintes de 45 cm de long provenaient d’un animal bipède pesant dans les 130 kilos. Il est possible d’en savoir plus sur ces analyses d’empreintes dans cet article.

Les créatures importées : sirènes, loups garous, lutins

Sans éliminer la possibilité que dans une forme ou une autre ces êtres mythiques existent dans les traditions autochtones, nous devons distinguer certains aspects de l’imaginaire Québecois comme des figures folkloriques directement parvenues depuis l’Europe dans les bagages des colons.

Les sirènes

Nous reprenons ici des récits de voyageurs évoquant des sirènes présentés dans le second tome des Légendes du Saint-Laurent , publié en 1985 :

Des vieux pêcheurs gaspésiens attardés en mer, le soir, lorsqu’il y avait apparence de tempêtes, furent encerclés par des sirènes de mer, «les plus jolies créatures jamais passées sous la couronne du soleil». Ces jeunes femmes au corps en forme de poisson avaient la chair couleur de flétan et la chevelure comme de la filasse tombant jusqu’à la ceinture. Gardant toujours dans l’eau le bas de leur corps, elles s’approchaient de la barge en chantant des refrains pour charmer les pêcheurs. Par la douceur de leur voix et la grâce de leurs gestes, elles tentaient de retenir les hommes en mer jusqu’à ce que la tempête fasse chavirer leur bateau. Une fois les hommes noyés, elles retournaient dans les profondeurs du Saint-Laurent où elles s’étaient jadis « écartées » alors qu’elles se dirigeaient avec d’autres sirènes vers la mer Rouge. Une fois seulement, une sirène monta sur un pont en se glissant le long des amarres. Elle demanda à un pêcheur d’utiliser son canif pour débarrasser sa peau des sangsues qui la piquaient. Une autre fois, une sirène demanda aux hommes de s’éloigner des lieux : «Vous vous trouvez au-dessus de notre église et vos lignes dérangent un office religieux». Des pêcheurs du Bas-du-Fleuve, eux, aperçurent des « hommes de mer» au teint brun et à la «fale» dorée ; aux grands yeux bleus et à la tête rasée comme des moines.

Le loup garou allemand de Neuses ( Ansbach aujourd’hui). 1685

 

Le Loup garou

Il y a de nombreux contes Québecois sur les loups garous, et un épisode historique fameux en lien avec le loup garou au Québec,  avec ces deux articles publiés en 1767/66, davantage sur ce sujet ici.

L’on apprend de Saint-Roch, près de Cap Mouraska (Kamouraska) qu’il y a un loup-garou qui court les côtes sous la forme d’un mendiant, qui, avec le talent de persuader ce qu’il ignore, et en promettant ce qu’il ne peut tenir, a celui d’obtenir ce qu’il demande. On dit que cet animal, avec le secours de ses deux pieds d’arrière, arriva à Québec le 17 dernier et qu’il en repartit le 19 suivant, dans le dessein de suivre sa mission jusques à Montréal. Cette bête est dit-on, dans son espèce aussi dangereuse que celle qui parut l’année dernière dans le Gévauclan (Gévaudan); c’est pourquoi l’on exhorta le public de s’en méfier comme d’un loup ravissant, (La Gazette de Québec, le 14 juillet 1766).

De Kamouraska, le 2 décembre, nous apprenons qu’un certain loup-garou, qui roule en cette province depuis plusieurs années, et qui a fait beaucoup de dégâts dans le district de Québec, a reçu plusieurs assauts considérables au mois d’octobre dernier, par divers animaux que l’on avait armés et déchaînés contre ce monstre, et, notamment, le 3 de novembre suivant, qu’il reçut un si furieux coup par un petit animal maigre, que l’on croyait être entièrement délivré de ce fatal animal, vu qu’il est resté quelques temps retiré dans sa tanière, au grand contentement du public. Mais on vient d’apprendre, par le plus funeste des malheurs, que cet animal n’est pas entièrement défait, qu’au contraire, il commence à reparaître plus furieux que jamais et fait un carnage terrible partout où il frappe. Méfiez-vous donc tous des ruses de cette malicieuse bête, et prenez garde de tomber entre ses pattes. (La Gazette de Québec,  10 décembre 1767)

Les lutins

Selon cet article ils sont surnommés  « citoyens » dans le folklore québecois,  et sont décrits comme  mesurant à peine 18 pouces de hauteur ( 60cm), avec au milieu du front, un œil unique et brillant,  un nez rond minuscule, des jambes de grenouilles et un long chapeau pointu. Les lutin québecois sont la réplique exacte de leurs cousins d’outre-atlantique.

Soit bénéfiques, soit maléfiques, ils rendent des services et jouent des tours, comme par exemple dans ce conte.

Les Goguelins d’Omer Grosbois
Tous dans le VILLAGE dévoraient des yeux la femme d’Orner Grosbois, Marie-Blanchette, tant elle était belle et attirante. Le grand Pippelard, qui avait quelque accointance avec le DIABLE, ne cessait de penser à elle. C’est ainsi que, avec l’aide du diable, il envoya dans l’étable d’Orner une armée de petits êtres maléfiques, aux mains et aux pieds griffus, des goguelins, chargés de persécuter le bétail.
Ce fut alors un colossal TOHU-BOHU, puis la panique fut complète lorsque les goguelins libérèrent chevaux, vaches et MOUTONS. Ignorant que Pippelard était responsable de leurs misères, Orner et sa femme l’appelèrent à leur secours : «Il faut que j’exorcise, dit le traître à Orner, mais, pour cela, j’ai besoin de ta femme.» Pippelard emmena Marie-Blanchette dans l’étable.
L’on ne sait comment se déroula le rituel, mais, une heure plus tard, quandMarie-Blanchette sortit de l’étable, le sourire aux lèvres et un peu de foin dans les cheveux, tout était rentré dans l’ordre. Un bonheur n’arrivant jamais seul, après neuf mois, elle donnait à Orner un beau et gros BÉBÉ, ce qui le combla, car, jusqu’alors, elle n’avait pas réussi à tomber enceinte. Choisi comme parrain, Pippelard témoigna à son filleul un amour tout paternel !

illustration du conte de Hans Christian Andersen Le Nixe chez l’épicier, par Vilhelm Pedersen.

En plus de sa taille réduite, le lutin est réputé pour son espièglerie, son don de métamorphose et d’invisibilité, son côté facétieux bienfaisant ou malfaisant. Et il adore lui aussi tresser la crinière des chevaux la nuit. En témoigne ce conte, issu de cet ouvrage :

L’histoire suivante est arrivée au grand-père Dumas des Iles-de-la-Madeleine qui se rendait compte depuis quelques temps, le matin, que sa jument était toute essoufflée. Il se dit : « il se passe certainement quelque chose ». Il se méfiait d’autant plus qu’elle avait été bien lavée, bien brossée et que sa crinière était toute tressée! « Il faut que j’en aie le cœur net! Ce soir, je vais aller me cacher dans la grange, derrière une meule de foin, pour faire le guet. »

Tout à coup, vers minuit, la porte s’ouvrit et il vit deux petits bonhommes qui s approchèrent de l’animal, commencèrent à lui tresser la crinière et la queue, à le brosser soigneusement; puis ils s agrippèrent à son cou, le menèrent vers la porte et le lancèrent  au galop dans la prairie, au clair de lune.

Le grand-père savait désormais ce qui se passait et il décida d’attraper les coupables. (…)Le lendemain, avant que les lutins n’aient fini leur besogne, le grand père sortit de sa cachette et les interpella : « vous allez laisser ma jument tranquille, vous autres, sinon elle en mourra. C’est une vieille jument ! »

Mais les petits lutins lui répondirent : « nous, monsieur, sachez qu’on a le droit de monter tous les chevaux qu’on veut. La seule condition qu’on doit respecter, c’est d’en prendre soin. Et c’est exactement ce qu’on fait ».

Inutile de dire que le père Dumas n’était pas content ! Il se dit : »il faut vraiment que je trouve un moyen de me débarrasser de ces fameux visiteurs ».

Le lendemain soir, il réintégra sa cachette et installa au-dessus de la porte de la grange un seau rempli d’avoine. Comme prévu, les lutins se pointèrent le nez, poussèrent la porte et bang! Le seau tomba par terre. Toute l’avoine se répandit, et comme les lutins devaient absolument remettre les lieux en l’état ou ils les avaient trouvés à leur arrivée, ils ramassèrent les grains d’avoine jusqu’à ce qu’il n’en reste plus un seul sur le plancher. Ce travail leur prit tellement de temps que le soleil était déjà levé quand ils eurent terminé ! Alors ils se dirent : « le vieux a eu raison de nous. Maintenant, nous ne pourrons plus rester ici pour aller nous promener à cheval; il faudra nous en aller ailleurs ».

Nous arrivons au terme de ce voyage dans le bestiaire fantastique Québecois. Certains thèmes tel que les monstres lacustres, le bigfoot ou le loup garou n’ont été qu’effleurés. Nous aurons probablement l’occasion d’y revenir dans un prochain article.

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