Elle était Marie-Jeanne Koffmann 5

Le Caucase, terre sauvage

Pendant près de cinquante années, Marie-jeanne Koffmann va donc enquêter inlassablement dans une seule région, «son» Caucase. Massif montagneux de 1200 kilomètres de long, d’une Surface: 580 000 km², le Caucase se situe à la frontière entre la zone tempérée continentale et la zone subtropicale humide (autour de la mer Noire et du sud de la mer Caspienne), mais certaines régions sont toutefois régies par le climat sec d’Asie centrale. Coincé entre mer Noire et mer Caspienne, Le Caucase couvre la Géorgie, l’Azerbaïdjan et l’Arménie ainsi qu’une partie de la Russie, de la Turquie et de l’Iran.

Plus de 7000 espèces de plantes et d’animaux, sans compter les insectes. Bon nombre de celles-ci sont endémiques: plus d’un tiers des poissons ne se trouvent nulle part ailleurs.

 Cette région au cœur de nombreuses légendes et mythologie : haut de 5033 mètres, le mont Kazbek se situe au centre du massif. Un exemple : Selon la mythologie grecque, c’est là que Zeus aurait enchaîné Prométhée, qui s’était attiré les foudres de celui-ci en dérobant le feu aux dieux et en le donnant aux humains.

  Le Caucase n‘en demeure pas moins relativement méconnu, et en dépit de son rôle de destination touristique prisée hier comme aujourd’hui, de larges parties sont quasiment inaccessibles. Laissons Marie-Jeanne Koffmann nous décrire la géographie de ses lieux de recherche, tels qu’ils furent au milieu du 20ème siècle:

Quelques rappels géographiques sont nécessaires : le Grand Caucase ou Chaîne principale de partage des eaux, dont l’altitude oscille entre 3000 et 5000 mètres, prend lentement sa hauteur, au Nord, sur environ 200 kilomètres d’une montée progressive de cinq chaînes plus ou moins parallèles, couvertes de pâturages et de forêts, puis, presque uniquement rocheuses. Bien au contraire, sur son versant sud, où nous nous trouvions, il perd toute cette hauteur sur un espace d’environ 15 kilomètres, c’est-à-dire qu’il tombe presque à pic, comme le font aussi, en majestueuses cuestas, les cinq chaînes précédentes.

 Les eaux qui découlent de ses hauteurs ont taillé sur ses flancs des hautes vallées si profondes que ce sont de véritables canyons, dans tous les cas extrêmement difficiles d’accès et dont certaines n’ont jamais été visitées par l’homme. Les deux petites villes, Zakataly et Biélokany, se situent au pied de cette dénivellation. La Chaîne de partage des eaux passe ici à 3200 mètres d’altitude. Les versants, très pentus, sont à 70% occupés par la forêt, les 30% restants par des prairies alpestres et des rochers.

Sa faune est très diversifiée : Mammifères : Auroch du Daguestan (endémique), Chèvre à bézoard (endémique), Chamois, Renne du Caucase, Sanglier, Ours du Caucase, Loup ( en voie de disparition), Renard, Chacal, Blaireau, Fouine (deux espèces), Chat sylvestre, Lynx, Belette, Ecureuil du Caucase, Lièvre des bois et de nombreuses autres espèces. Prenons note des Lérots, communs et dryas, qui après s’être bien repus en été, dorment six mois dans les creux des arbres ; des Campagnols, formant des colonies entières dans les prairies, et des Souris des bois, qui se reproduisent toute l’année durant.

Oiseaux : dans cette région, les versants méridionaux abritent plus de cent espèces, dont de nombreuses endémiques, notamment le Tétras du Caucase et la Caille de montagne, dont les œufs et les poussins constituent une source de nourriture très facile d’accès.

La rive gauche de l’Alazane est couverte de forêts d’une densité exceptionnelle (Chêne, Erable, Tilleul, Noyer, Charme) comptant de nombreux arbres fruitiers sauvages : Pommiers, Poiriers, Grenadiers et autres.  Toutes ces forêts de montagne, comme les rives de l’Alazane, abritent de vastes espaces de fourrés d’épineux interdisant absolument le passage de l’homme. Si l’on y ajoute la transformation marécageuse de surfaces importantes dans le bassin de l’Alazane et la verticalité des murailles rocheuses des défilés, l’on comprendra pourquoi des massifs entiers de ces territoires ne sont jamais visités par l’homme.

Ainsi, Rassoul Taïrov, natif de ces lieux, nous affirmait que personne n’avait jamais pénétré dans les forêts de l’Alazane au sud du village de Danatchi, à 8 km de Zakataly. S.M. Loukomsky entendait dire que personne ne peut pénétrer aux sources de la rivière Katekh-Tchaï (le zoologiste bien connu, Nicolas Véréchtchaghine, les a aperçues dans sa jeunesse au prix d’immenses efforts et en surmontant l’un après l’autre des pièges mortels, dont il a fait le récit palpitant dans un de ses livres). Les localités s’échelonnent au pied de la chute abrupte du versant sud, le long de la route. Plus haut, il n’y a rien.

Si l’on considère que les versants Nord tangents de ce même tronçon de la Chaîne principale, sont, eux aussi, inhabités, nous obtenons une superficie d’environ 1500 km² libres de la présence de l’homme. Ce tronçon n’est traversé du nord au sud (plus exactement du Nord-est au Sud-ouest) que par quatre pistes, peu praticables, assurant les contacts entre le Daguestan et l’Azerbaïdjan.

A la fois zone d’échange, carrefour de civilisations, zone refuge, le Caucase est aussi porteur de mystères, et le plus grand d’entre eux est l ‘almasty. Longtemps avant Marie-Jeanne Koffmann, plusieurs explorateurs ont relevé sa présence.

Ainsi au Xème siècle de notre ère, le Caucase a été visité par Abdul Hassan Ali Massoudi, un voyageur érudit qui a mérité l’appellation d’« Hérodote arabe », et qui écrit : « Derrière ces quatre montagnes sur la côte se trouve une autre vallée près de précipices : là sont les forêts et les jungles, habitées par une sorte de singe qui se tient debout et à la face ronde ;  ils ressemblent extrêmement aux hommes, mais ils sont couverts de poils. Il arrive parfois qu’on en capture. Il montre alors beaucoup d’intelligence et de docilité.

S’ils n’ont pas l’usage de la parole pour s’exprimer, ils comprennent néanmoins ce qui est dit. Mais ils s’expriment par signes. Parfois on les offre aux rois de ces nations, et on leur apprend à se tenir près du roi, et à goûter tout ce qui est sur la table. Car les singes ont le don de reconnaître si un plat ou une boisson est empoisonné. Une partie est donnée au singe qui la renifle. S’il mange, le roi mange en confiance. Sinon, il sait qu’il y a du poison. La même pratique s’observe chez beaucoup de souverains chinois et indiens. Nous avons rapporté dans ce livre un récit transmis par les délégations chinoises envoyées à Al-Mahdi, et relaté ce qu’elles disaient de l’usage que leurs rois faisaient de singes pour goûter leur nourriture ».Abdul Hassan Ali Massoudi, Prairies de l’or et mines de gemmes (Xème siècle), traduit de l’arabe par Aloys Sprenger, Londres, 1841, V.1, p. 440.

Plus proche de nous, Douglas William Freshfield, un exceptionnel alpiniste et explorateur anglais, président de club alpin,  qui a voyagé dans le Caucase en 1888 et vaincu quelques-uns de ses plus hauts sommets, évoque l ‘alamsty dans son récit Les explorations du Caucase : Des officiels russes répétaient gravement d’étranges histoires sur une race d’hommes sauvages, qui n’avaient ni village ni langage, mais se montraient nus et marmonnaient dans les profondeurs des bois, qui vivaient de baies et était dépourvus d’armes à feu .

Boris Porchnev, dans « La lutte pour les troglodytes » révèle au chapitre 10 (p. 162-164) les travaux à la fin du XIXème siècle de Constantin A. Satounine sur le Biabane-gouli (homme sauvage local) :

Constantin A. Satounine s’est illustré autrefois par ses études sur la faune du Caucase. Il a découvert et décrit six genres, soixante espèces et plus de quarante sous-espèces d’animaux jusqu’alors inconnus, en majorité des vertébrés. Il n’y a qu’une seule espèce qu’il ait décrite, non pas dans une communication scientifique officielle, mais sous la forme de souvenirs de voyage, et ce parce qu’il n’avait pas pu étaler le « type » de cette espèce sur sa table de dissection. Le récit en question est intitulé Biabane-gouli. Oui, ici aussi la ressemblance des noms est frappante : c’est vraisemblablement la même dénomination que celle de Goulbiavane utilisée au Pamir. Le texte du grand zoologue a été publié en 1899 : 

Constantin A. Satounine fut l »un des premiers zoologistes russes à s’être sérieusement engagé dans l’étude ciblée de la taxonomie et du faune des petits mammifères. Auteur de 240 articles scientifiques, Il a décrit de nombreuses nouvelles espèces de mammifères en Russie et en Asie centrale, dont la  taupe du Caucase ( Talpa caucasica ), le conservateur de Shelkovnikov ( Neomys schelkovnikovi ), le hamster de Roborovsky ( Phodopus roborovskii ), etc.

Tard dans la soirée, il cheminait avec ses guides à travers les forêts désertes des contreforts de la chaîne de Talych, tout au sud de l’Azerbaïdjan. Une hallucination est hors de question, a souligné avant tout cet excellent observateur de la nature qu’était Satounine, même les chevaux ont pris peur et se sont cabrés ! Quant à lui-même et ses guides, ils ont clairement vu la même chose, à savoir la silhouette d’un être humain d’aspect sauvage, apparemment une femme, qui avait franchi le sentier devant eux et traversé une clairière. C’est seulement à l’issue de l’étape, lors de la halte, que notre zoologiste a pu recueillir des renseignements locaux sur les hommes velus et privés de paroles qui vivent dans les monts Talych.

Au bout de quelques années d’enquêtes de terrain, Marie-Jeanne Koffmann pouvait circuler où elle le souhaitait de part et d’autre de la chaine montagneuse du Caucase, tout le monde la connaissait. Mais lors de la première de ses expédition en 1959, les choses pouvaient parfois s’avérer compliquer. Surtout lorsqu’un membre de son équipe de recherche nommé Merejinski  fit usage d’un pistolet lorsqu’il se trouva au contact d’un homme sauvage au cours d’un affût nocturne, il perdit ensuite définitivement son sang-froid.

 Merejinsky, devenu effectivement « possédé », se mit à répandre le bruit d’une récompense mirobolante pour un kaptar tué. Partie de 10 000, la somme atteignit bientôt les 50 000 roubles. Toute la ville tomba dans un état d’effervescence indescriptible. Des foules entières nous  suivaient pas à pas. Nous en arrivâmes à ne plus pouvoir ni entrer, ni sortir de notre hôtel, nous devions littéralement nous frayer un passage à travers une foule bruyante comptant parfois jusqu’à deux cents personnes au moins, sous une grêle de questions, de quolibets et de propositions farfelues. Rien d’étonnant, donc, à l’attitude radicalement négative des dirigeants locaux du Parti vis-à-vis de notre « activité ».Très vite, nous fûmes invités, Zert et moi, par le Premier secrétaire du Comité régional, le camarade Mansourov, à vider les lieux. « Vous gênez ici » répéta-t-il plusieurs fois au cours d’un entretien très pénible pour nous.

Croquis de l’almas selon un témoin

Pendant les années suivantes, Marie-jeanne Koffmann pu constater combien le folklore autour de l‘almasty était vivant, dans toutes les partie du Caucase.

Selon d’autres rumeurs, on aurait vu, parfois, d’énormes nids tressés dans les branches et attribués à l’homme sauvage comme lieux de séjour. Bien des années plus tard, dans une autre forêt, au Karatchaï, sur le versant septentrional du Caucase, alertée par des chasseurs locaux expérimentés, je pus explorer pareil nid :de forme ovale (1,20m x 1m). Bord externe : une branche de 5 cm de diamètre a été incomplètement cassée, soumise à un mouvement de torsion à 360° autour de ses filaments (ici aussi ce mouvement n’a pu avoir été opéré qu’avec une main), puis infléchie vers la gauche. A 80 cm à gauche du point de rupture de la première branche, une branche identique est cassée tordue à 360° et entrelacée avec la première comme des bras entrecroisés sur la poitrine. Sur le reste du périmètre, bords identiques, moins puissants. Branches plus petites, toutes ramenées vers le centre, formant un hamac épais, une litière spacieuse, moelleuse. Je m’y installait confortablement.

Nids de sasquatch supposés

Nids et tanières confectionnés par l’ours noir, nid d’aigle occupé par un ours noir

Une autre question : comment se fait-il qu’un animal si corpulent et si peu ordinaire ait pu passer inaperçu ? Celui qui s’est frayé lui-même son chemin (le géologue, le trappeur, le zoologiste) connaît, lui, l’immensité du monde, encadré par deux routes. Des routes par elles-mêmes difficiles, rarement fréquentées et souvent éloignées, très éloignées, l’une de l’autre.

De tels massifs se sont conservés au Caucase. Ils sont, évidemment, relativement restreints. Mais cette « relativité » suppose des centaines, si ce ne sont des milliers de kilomètres carrés d’un relief très tourmenté, couvert d’épaisses forêts. Ce ne sont pas quelques représentants, mais des régiments entiers d’« Hommes-des-neiges » qui pourraient y vivre sans être importunés.

Sans être importunés, donc sans être vus. Par contre, les almasty, eux nous voient.

Marie-Jeanne Koffmann : Dès le début de mon enquête sur l’almasty du Caucase, j’avais été déconcertée par certains détails bizarres revenant en permanence dans la description des yeux : leur éclat rouge vif, leurs étranges mouvants oscillatoires, le battement inhabituellement fréquent des paupières. A la relecture de ces témoignages, je devais m’apercevoir que ces particularités ne s’observaient que de nuit ou sous un éclairage déficient.

La transition qui suit pourra paraître insolite : il s’agit des conseils prodigués par un opticien, Alain van der Cruyssen, aux adeptes du tourisme à bicyclette. A vrai dire, je n’étais guère prête à trouver un apport à la théorie des hominoïdes reliques dans la Revue officielle de la Fédération Française du Cyclotourisme, dont un numéro s’était retrouvé fortuitement entre mes mains. Voici, cependant, ce que doivent savoir les campeurs surpris par l’obscurité. La vision centrale se faisant défaillante, au profit de la vision périphérique dans l’obscurité, on aura recours, pour mieux utiliser notre rétine, à la vision décentrée et au balayage. La vision décentrée consiste à regarder l’objet non pas directement, mais légèrement de biais (sous environ 10°). Le balayage consiste à pratiquer un « déplacement lent, régulier et systématique » du regard, ce qui « permet aux bâtonnets de récupérer une sensibilité meilleure pendant la courte période où ils ne sont pas stimulés. Pour la même raison, il est conseillé de cligner fréquemment et puissamment des paupières »

Cette statistique réunit plusieurs centaines de témoignages recueillis à travers tout le Caucase, pays de haute montagne dépassant en superficie réelle celle de la France et abritant une quinzaine d’états et républiques peuplés de centaines d’ethnies et de nationalités, confessions, langues, cultures, traditions fort diversifiées: nous constatons qu’en chiffres absolus les observations nocturnes portent sur plus de la moitié des rencontres en Azerbaïdjan (51,06%) et 34% en Kabarda, au Caucase central du Nord. Ces chiffres, bien qu’explicites en eux-mêmes, nécessitent un commentaire : – En milieu rural, et plus encore quand il se situe en montagne, les activités humaines sont minimes la nuit, et les promeneurs bien rares (surtout, répétons-le, dans le Caucase, avec ses immensités sauvages, ses pistes rares et fréquemment impraticables, le cheval pour moyen de déplacement traditionnel, les villages pauvrement éclairés, une circulation automobile balbutiante) ; – La perception visuelle de l’homme, la nuit, se limite à quelques dizaines de mètres ; – Toute créature, la nuit, peut aisément esquiver l’homme.

Or, d’après nos chiffres, les rares habitants se retrouvant la nuit en forêt ou dans les champs, rencontreraient autant ou plus d’almastys que le total des villageois en observent dans la journée. Un détail, mineur, mais non sans importance pour notre propos : on peut s’interroger sur les causes de la plus grande fréquence des rencontres nocturnes en Azerbaïdjan. L’explication suivante me paraît plausible : l’Azerbaïdjan, sur les versants méridionaux du Grand Caucase, est un pays subtropical aux températures élevées, torrides en été. Comme dans tous les pays chauds, la population rurale interrompt ses travaux dans la journée, s’animant le soir et une partie de la nuit. Au Caucase du Nord, dominé par les grands glaciers, des versants septentrionaux, le climat sévère, l’hiver beaucoup plus rude et long, l’été très humide n’encouragent guère les paysans à emprunter les habitudes d’autres Caucasiens. (…)

La dernière caractéristique de différenciation des yeux des animaux nocturnes est le tapetum lucidium, qui se trouve juste derrière la rétine et agit comme un miroir pour lier les photons non absorbés sur la rétine afin qu’ils puissent être absorbés. On peut voir les effets de ce mécanisme biologique lorsque vous voyez la « lueur » des yeux de votre chien ou chat de compagnie dans le noir si vous les éclairez. Cela est dû au tapetum lucidium réfléchissant la lumière non absorbée hors de la pupille.

Les informations sur l’activité nycthémérale ( c’est-à dire dire sur un cycle de 24h. ndr) de l’almasty sont venues compléter et corroborer celles dont nous disposions sur son appareil visuel : elles s’expliquent les unes par les autres et s’induisent mutuellement. Ces résultats paraissent suffisamment convaincants pour nous permettre quelques réflexions sur l’hominoïde relique. S’il se montre parfaitement habilité à une vie nocturne, il semblerait néanmoins que cette capacité est de nature secondaire et a été imposée par la nécessité d’une adaptation à un mode d’existence qui, initialement, n’était pas celui de l’espèce. En effet, sa rétine n’est pas celle des mammifères menant naturellement une vie entièrement ou partiellement nocturne. Ceux-ci, rappelons-le, ne possèdent ni macula, ni fossettes, privilèges exclusifs de l’homme et des grands singes, espèces essentiellement diurnes ; ils bénéficient, par contre, d’autres structures conférant à leur regard une grande sûreté car tous sont à la recherche de nourriture de dimension parfois minuscules. C’est bien parce que l’hominoïde ne dispose pas d’une rétine d’animal nocturne, mais d’une rétine de type humain, qu’il est obligé de recourir au stratagème compensatoire de la vision décentrée et du balayage, stratagème emprunté par l’homme lui-même en l’absence de lumière. Le passage à l’existence nocturne serait donc récent dans l’histoire de l’espèce.

Possible cliché d’une paire d’yeux luminescents d’un yowie

Partageant avec l’homme les mêmes biotopes, condamnés par là à une coexistence menaçante, les hominoïdes n’auraient-ils pas été contraints, un jour, à basculer dans une autre catégorie temporelle que celle qui leur était naturelle, pour se créer une certaine marge de sécurité contre leur terrifiant cousin ? Sans hasarder des parallèles pouvant s’avérer superficiels, n’est-il pas curieux que les petits primates inférieurs mènent une existence nocturne uniquement dans les régions habitées par des primates supérieurs, restant diurnes s’ils sont dispensés de ce voisinage ?

Christian Emmanuel Hoppius: Anthropomorpha. In: Amoenitates Academicae. Band 6, Stockholm, 1763

En guise de conclusion sur son étude de la vision nocturne de l’almasty Marie-Jeanne Koffmann cite une traduction russe du Systema naturae de Linné, publiée en 1760, puis retrouvée par Dmitri Bayanov en 1965 :

Troglodytes Homo nocturnus « Ces fils des ténèbres, qui ont échangé le jour contre la nuit et la nuit contre le jour, me semblent plus proches de nous [ndlr : que les autres anthropoïdes]. Ils sont connus par leur nom depuis les temps de Pline. Ils marchent sur deux jambes, comme nous. Ils se cachent le jour dans les cavernes. La nuit, ils voient distinctement. C’est dans l’obscurité qu’ils assurent leurs besoins, volant aux hommes ce qui leur tombe sous la main. Ils n’ont ni langue propre, ni même parole ».

à suivre : Les dernières années, de l’ombre à la lumière

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